La Buse et ses sosies

Publié le par olivier frimat photojournaliste

La buse variable est un des rapaces diurnes les plus communs du massif. Les ailes dépolyées et la queue en éventail, elle s'élève dans un ciel bleu azur et dessine durant des heures de larges orbes. Mais la confusion avec un alter ego est facile. Pour éviter que le doute ne plane d'avantage, approfondissons nos connaissances sur cet hôte des abords routiers, des plaines et des montagnes vosgiennes et de ses doubles...






Envol d'une buse variable à Corcieux(88) Photo Olivier Frimat


Cinq heures. Hièèèh Hièèèh... Un miaulement haut perché caractérise l'arrivée d'un rapace. Le champ à l'herbe rase situé en bordure de la départementale 181 entre Corcieux et la Houssière (88) représente un terrain de chasse qu'affectionne un trio de buses variables Buteo buteo. Le ballet des triples buses débute sur un tempo réglé au quart de plume. La première est une femelle. Un beau bébé à l'iris gris brun d'1kg350 raide comme un piquet à l'affût sur le câble d'un poteau éléctrique. La seconde au ventre blanc plane au ras du sol et s'immobilise sur une motte terreuse. La troisième paraît inactive, paresseuse. L'oiseau de proie dont la longueur ne dépasse pas 58cm pour une envergure d'1m32 possède une queue courte, large et arrondie. Sa patte est repliée sous un pompeux poitrail. Sédentaire, la belle est en alerte constante, le regard aiguisé et l'ouïe fine. La buse commune aux ailes convexes aux extrémités se délecte de bêtes terrestres, un régime composé à plus de 80% de micromammifères. Incapable de saisir des proies en vol du fait de son allure lourdaude et de sa lenteur dans ses déplacements, le rapace à la tête rondouillarde peut serrer de près une grenouille, ferrer une taupe qu'elle ingurgite ou dépèce sur place.


Buse variable. photo Olivier Frimat

Les colorations et les dessins des buses variables fluctuent entre le brun sombre et le blanc. Dans nos contrées, des spécimens peuvent prendre des allures de dames blanches et nicher jusqu'à 1200 m d'altitude, si le milieu de vie est favorable.


Buse variable. Photo Olivier Frimat


Buses variables se disputant un lombric. Photo Olivier Frimat


Buse en chasse. Photo Fabrice Cahez


Bondrée apivore. Photo Fabrice Cahez

Fréquentant les crêtes du Donon, mais également les rochers et les étangs du Pays de Bitche, la buse bondrée ou bpndrée apivore Pernis apivorus  se rencontre dans les Vosges à partir du mois d'avril. Le migrateur revient de ses quartiers d'hiver du sud saharien. De mensurations comparables, 1kg100 maxi, pour 60 cm de long et 1m50 d'envergure, la bondrée se distingue de sa consoeur variable par sa longue queue brune portant trois larges bandes foncées. le plumage est en règle général brun roux, mais il peut fortement varier d'un individu à l'autre. La tête est petite. l'oeil doré du mâle contraste nettement sur une tête grisâtre. L'élégant rapace fréquente les forêts et les bois clairesemés, entrecoupés de clairières ensoleillées. la bondrée se poste à l'affût sur une meule de foin, une taupinière ou dans un arbre. De là, elle observe durant des heures les allées et venues des guêpes, des abeilles, des frelons...Le régime alimentaire est constitué d'hyménoptères, mais l'élègant représentant des falconiformes peut aussi capturer des reptiles, des batraciens, plus rarement des rongeurs et des jeunes oiseaux au nid. La technique de chasse est simple. Au sol, la buse bondrée court le cou tendu vers l'alléchant nid de guêpes, puis creuse et éventre tantôt d'une patte, tantôt de l'autre la bonbonnière aux succulentes larves, insectes et leur couvain. Un épais plumage écailleux protège la mangeuse de guêpes des piqûres des insectes chatouillés par le bec crochu et pointu de l'oiseau.


Busard St-Martin Mâle en vol. Photo Fabrice Cahez

Dans la famille des Accipitridés, le busard Saint-Martin Circus cyaneus est plus filiforme et gracile qu'une buse. Avec ses teintes gris bleuâtre et l'extrémité des ailes ponctuées de noir, le mâle pourrait d'avantage s'apparenter à une mouette qu'à une buse. Le dimorphisme sexuel est fortement marqué entre mâle et femelle Appelé communément busard bleuâtre, le bel oiseau de proie est un adepte des milieux ouverts: abords du ried alsacien entre Colmar et Sélestat, mais également plaines et zones humides de Moselle, versant lorrain du massif. Présent toute l'année, il niche au sol et se nourrit principalement de petits rongeurs. Mais peut-être l'avez-vous déjà aperçu patrouillant à un mètre d'un champ de blé ou des labours?



Busard cendré mâle. Photo David Hackel

Le busard cendré Circus pygargus est encore plus svelte et agile que son homologue. De la pointe du bec à l'extrémité des rectrices, la longueur avoisine 47 cm pour une envergure d'1m20. Les femelles des deux espèces, de jolies brunes au collier blanchâtre et au dessous de l'aile sombre, sont si semblables qu'il est quasi impossible de les distinguer. Les mâles des deux espèces sont également des répliques ailées qu'il n'est pas évident de différencier, mise à part une barre noire en travers des rémiges secondaires pour le busard cendré (ou Montagu). Les flancs des parties inférieures sont rayés et tachés de roux et la queue est assez nettement barrée. En plus des rongeurs, le migrateur aux barres alaires noires capture de petits oiseaux et des lézards. Son goût pour les milieux ouverts est identique au Saint-Martin avec une préférence indéniable pour les lieux marécageux.

Le plumage du busard des roseaux Circus aeruginosus est uniformément brun chocolat. Le busard harpaye est un migrateur partiel dont la silhouette rappelle celle de la buse, dont il a la taille. Le rapace au plumage sombre fréquente les plaines marécageuses des Vosges, ainsi que les abords des lacs, des étangs et des cours d'eau pourvus d'une végétation riche en joncs et roseaux. A l'instar de ses semblables, le busard des marais est friand de reptiles, batraciens, rongeurs, oiseaux. Pour le nourrrissage des juvéniles, il chassera en particulier les foulques, poules d'eau, ainsi que les jeunes canards.
Son aire de nidification se trouve en forêts de résineux et petits bois. Il chasse en milieu fermé, mais également en milieu semi-ouvert.


Epervier d'Europe. Photo Fabrice Cahez

L'épervier d'Europe Accipiter nisus est le maître incontesté des attaques surprises. De taille modeste 38cm de long pour 70 cm d'envergure, le redoutable chasseur sème la terreur chez les passereaux qui constituent son régime alimentaire, mais ne rechognera pas à enrichir son menu par quelques lézards dodus, de croustillants insectes, de grassouillettes grenouilles... Sédentaire et commun au massif vosgien, l'épervier au plumage variable barré de brun est présent de la plaine jusqu'en montagne.


Faucon crécerelle. Photo Olivier Frimat


Faucon crécerelle sur fond de fruitiers en automne. Photo Olivier Frimat

C'est le cas également du faucon crécerelle Falco tinnunculus  qui est le rapace diurne le plus répandu des contrées vosgiennes. L'oiseau de proie sédentaire de 82 cm d'envergure pour 39 cm de long fréquente les zones rocheuses dans lesquelles il choisit de nicher, mais affectionne particulièrement les petits bois, les lisières forestières. Aisément repérable par son vol stationnaire lorsqu'il chasse, les randonneurs des crêtes vosgiennes peuvent le croiser en altitude aussi bien qu'en plaine. Campagnols et mulots constituent le fond de nourriture. C'est à terre qu'il capture ses proies qu'il repère depuis un poste fixe (piquet de parc, arbre, promontoire rocheux...). Aucune chance de la confondre avec une buse, ni même avec l'épervier. Le faucon est tacheté de brun noir sur roux. Les ailes sont pointues et le galbe ressemble à celui d'une faux.



Milan noir. Photo Olivier Frimat



Milan noir survolant un canoë kayak sur les bassins du Doubs à Villers le lac (25) Photo Olivier Frimat

Les milans possèdent une longue queue fourchue. Leur corps est svelte et effilé. La tête est petite et fine. La taille du milan noir Milvus migrans est similaire à une buse, bien que son envergure soit supérieure d'une trentaine de centimètres. L'oiseau au plumage sombre est un chasseur lymphatique au régime charognard. La couverture des ailes est claire et la tête jaunâtre. La queue fourchue coupée en ligne droite possède une faible échancrure, contrairement au milan royal Milvus milvus dont la queue brun roux présente une nette échancrure.Patrouilleur d'envergure (1m95 pour 66 cm de long) au régime charognard, le superbe rapace aux rémiges primaires noires, aux yeux jaunes se détachant sur une tête grise, est de moeurs plus terrestre que l'autre espèce. Ses virées le conduisent au-dessus des champs. On l'observe souvent branché à l'affût d'une taupe, d'un lièvre juvénile,de rongeurs...mais également de cadavres d'animaux ainsi que de poissons morts.


Milan Royal. photo Fabrice Cahez

On accuse encore la buse et ses sosies de nombreux maux. Le paysan tremble pour son poulailler, le chasseur s'alarme d'une perte de <<son gibier>>. L'homme doit freiner sa boulimie productive et outrancière. Son raisonnement doit inclure les réalités biologiques de la biodiversité s'il veut que son discours s'inscrive dans le cadre d'un développement durable, pour que planent la buse et ses sosies au dessus de la tête de nos...enfants!





Magazine Massif des Vosges 31 La buse et ses sosies. Rubrique nature. Page 68.



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H
Merci pour vos précieux renseignements concernant la bondrée apivore car il se trouve que j'avais un nid de guêpes chez moi et je l'ai vue descendre pour se nourrir des larves ! en plus du service rendu, j'ai pu admirer d'assez près ce très bel oiseau et savoir ainsi qu'il allait me débarrasser de ces &quot;locataires indésirables&quot;
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F
Bonjour, <br /> Mais je vous en prie. C'est l'oiseau qu'il convient de remercier.<br /> Je ne suis plus trés actif sur ce blog en ce moment, mais sachez que je vais créer une nouvelle rubrique naturaliste dans les mois qui viennent, avec des histoires, des lectures naturalistes, des nouvelles images, par monts et par Vosges. Ce sera sans doute sur un autre site. Au plaisir de vous lire. Olivier Frimat